Evoluant dans le milieu du tissage du textile artisanal à base de fil de coton depuis 1987, Jeanne Lompo contribue à maintenir la flamme du «consommons burkinabè». Venue dans le métier par un pur hasard, cette brave dame a porté sur les fonts baptismaux, en février 2015, une entreprise familiale de tissage qui s’est donné comme objectif primordial la promotion du textile artisanal et du coton burkinabè.
Elle avait une ambition chevillée au corps: amener les populations d’ici et d’ailleurs à adopter le Faso Dan Fani (pagne tissé du Burkina, Ndlr) dans leur quotidien vestimentaire! Et lorsqu’elle a commencé à maîtriser les contours du métier de tisseuse, Jeanne Lompo s’est lancée corps et âme dans l’aventure. Mal lui en prit, car le chemin était semé d’embûches.
«Je n’avais pas les moyens pour acheter des fils et tisser beaucoup de pagnes. De même, mes connaissances n’étaient pas des plus approfondies dans le domaine et les gens ne s’intéressaient pas à ce genre de vêtements. Je décrochais rarement des commandes. Parfois j’ai laissé tomber le métier et à chaque fois j’y suis revenu». Cette abnégation finira par payer suite à sa rencontre, en 2003, avec une expatriée américaine qui résidait à Ouagadougou. Travaillant dans sa résidence comme cuisinière et ménagère, Jeanne Lompo lui montre des pagnes tissés, produits de son génie créateur.
Sa patronne promit alors de lui apporter de l’aide. La perche tendue se présentera sous la forme d’une invitation à venir exposer à l’Ecole internationale américaine de Ouagadougou, à la faveur d’un marché de Noël.
«Après m’avoir montré des motifs à réaliser, elle m’a prêté de l’argent (150 000 F CFA), afin que je puisse confectionner des pagnes tissés et teintés à partir des motifs d’un catalogue», se rappelle encore Mme Lompo. Après la vente d’une journée, elle s’est retrouvée avec 285 750 F CFA. C’est ce coup de pouce qui lui a permis de s’autonomiser et de nouer des contacts avec plusieurs clients de diverses nationalités.
Au fil du temps, elle ouvre une boutique de vente de ses produits Faso Dan Fani. Tout en partageant son savoir-faire avec plusieurs de ses consœurs, Jeanne Lompo, résolument en quête de la qualité de ses productions, s’est personnellement formée à la teinture. Ce qui lui permet de maîtriser toute la chaîne de confection de ses pagnes et autre objets utilitaires. «Ma teinture et mon tissage sont de qualité et ils sont différents des autres», s’enorgueillit celle pour qui le Dan Fani «sert aussi à confectionner des sacs, des cartables, des rideaux, des portes clés, des sacs à vins et à tablette…».
Et puis la diversification des produits lui permet, assure-t-elle, de toucher tous les types de publics possibles.
Aussi apprécie-t-elle positivement la décision du gouvernement de transition invitant, en septembre 2015, les Burkinabè à privilégier le port du Faso Dan Fani lors des festivités marquant la journée internationale de la femme, le 8 mars de cette année. «Cela arrange d’abord les tisseuses que nous sommes et ensuite contribuera au développement du pays à travers le rayonnement à l’international».
Mais en 29 ans de carrière, tout ne fut pas rose. Comme principales difficultés, Dame Lompo évoque la non disponibilité, l’augmentation du prix et la baisse substantielle du poids des fils de coton. Malgré tout, elle ne compte pas baisser la qualité de ses pagnes tissés.
Qu’à cela ne tienne! Cette tisseuse acharnée ambitionne déjà de transformer son unité familiale, baptisée «Faso BeauTex», en une entreprise de tissage reconnue au plan national et international. Mais également de créer un centre de formation au métier de tissage dédié aux jeunes filles et aux femmes qui n’ont pas eu, comme elle-même, la chance «d’aller loin à l’école». Une manière pour celle qui soufflera sa cinquantième bougie dans trois ans de préparer la relève.
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