Bras dur. Il en impose. Haut de deux mètres, large comme un meuble, la présence d’Issaka Sawadogo ne passe pas inaperçue. Pourtant, derrière son côté colosse, l’homme est souple. Sur le porte-manteau, à côté de ses casquettes d’acteur, de metteur en scène et de musicien, on trouve aussi celle du danseur. Un talent qu’il a acquis dans sa jeunesse, quand il a quitté le Burkina Faso pour rejoindre le prestigieux Nationaltheatret, théâtre national norvégien.
À ce moment, le comédien habitué aux rôles du grand-gentil-taciturne ne songe pas au septième art. Du moins, il n’ose pas. Sa carrière peine à décoller, du moins jusqu’en 2004, année de sa rencontre avec l’artiste multidisciplinaire belge Nicolas Provost, réalisateur d’œuvres qui, elles aussi, peinent à se faire connaître. Les choses vont changer. Isaka tient son mentor, Nicolas tient sa muse.
Premières armes. Ensemble, les deux hommes voient grand. Ils voient cinéma. Jusqu’à la consécration, en 2011, quand Isaka Sawadogo campe le premier rôle de L’Envahisseur avec Nicolas Provost aux manettes. Dès lors, c’est le décollage. Isaka est à l’affiche de Diego Star en 2013 et aux côtés d’Omar Sy dans Samba, en 2014, où il interprète son rôle fétiche : le colosse aux pieds d’argile, plus sentimental que bagarreur.
Le rôle lui va comme un gant. Au point d’inspirer le personnage de Louis, qu’il campe dans la saison 1 de Guyane : une montagne taciturne qui fait la tronche. Pourtant, à la ville, Isaka Sawadogo sourit. D’ailleurs il ne fait que ça. Au point d’être adulé par les Guyanais, séduits par ce personnage aux épaules carrées, animé dans la vraie vie par un profond désir de transmission culturelle.
On l’appelle le maire. À l’image de son histoire et de sa triple culture, Isaka aime le partage. Il en a fait le fondement de sa personnalité. Lors de son séjour de neuf mois en Guyane, pour les besoins de la série, il n’a pas chômé. Son temps libre, il l’a consacré à la mise en place d’ateliers, de rencontres avec les locaux ainsi que de visites dans les écoles afin de leur délivrer son vécu et d’apprendre du leur. Au point d’acquérir le surnom, à terme, de « maire de Guyane », compte tenu de son dévouement lorsqu’il s’agit de doper le développement du pays.
Aujourd’hui, Isaka n’est plus un nordique. Après 22 ans passés à Oslo, il est de retour au pays, à Ouagadougou. Son rêve ? Que certains de ses compatriotes marchent sur ses traces. C’est pourquoi désormais il forme, lui-même, plusieurs comédiens locaux. Maintenant lorsque l’on pointera du doigt le cinéma du Burkina Faso sur un globe, il sera difficile de ne pas parler d’Isaka Sawadogo.
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