Avec son tout nouveau disque, Conquistadors, signé chez Universal, le duo Toofan, made in Togo, s’apprête à conquérir la planète entière avec ses tubes et chorégraphies épidémiques. Déjà stars en leurs pays et dans toute l’Afrique de l’Ouest, Master Just et Barabas veulent hisser haut l’étendard de leur pays et l’énergie de leur continent. Une tornade singulière et irrésistible.
Rien, a priori, ne semble pouvoir arrêter la tornade tout feu Toofan, made in Togo, labellisé « duo le plus chaud d’Afrique » : une épidémie sévère. Depuis leur formation, en 2005, les deux acolytes Masta Just et Barabas raflent la mise à tous les coups, collectionnant records – un milliard de vues sur Youtube – et récompenses – Best Francophone MTV Africa Music Awards 2014, etc.
Dès l’origine, leurs tubes et leurs chorégraphies dangereuses (« gweta », « cool-catché », « teré ») secouent les bassins et les guiboles de toute l’Afrique de l’Ouest. Loin, pourtant, de se satisfaire de leur succès, ceux que l’on surnomme « les fils du vent » cherchent aujourd’hui à attaquer de nouvelles contrées : de vraies machines de guerre ! « On n’est jamais rassasiés ! », assume Barabas.
Le titre de leur dernier disque, signé chez Universal, Conquistadors, donne le ton : « on part à la conquête de nouveaux fans, de nouveaux territoires… du monde entier ! », complète-t-il, en toute humilité. Après tout, le succès leur a toujours souri : « On fait carton plein ! Ce n’est pas pour jouer les vantards, c’est une réalité ! »
Un hymne pour le foot
Parce qu’ils ont abordé leur carrière côté « chance », Master Just se remémore avec une tendresse particulière leur première victoire, assurément « la plus belle » : « C’était en 2005, on était élèves et footballeurs en herbe. Cette année-là, les Éperviers (ndlr : l’équipe nationale togolaise) donnaient de la joie à tout un peuple. On a donc eu cette idée de composer un morceau à leur gloire. Chaque fois qu’ils gagnaient, notre chanson prenait de la cote. Et inversement, certains considéraient notre ‘hymne’ comme un fétiche pour les footballeurs. Du coup, c’est devenu un hit national, qu’on a chanté devant 30 000 personnes »
Avant ce coup d’envoi, il y a une histoire : celles de deux gamins qui traînent dans le même quartier résidentiel de Tokoin séminaire, à Lomé. Flashback. Barabas se rappelle : « On se connaît depuis l’âge de 11 ans. Je venais de déménager ici avec mes parents. J’étais le petit nouveau. J’habitais à deux pas de chez Master Just. On a commencé à squatter ensemble. D’abord, on jouait au foot. Puis on s’ambiançait avec le son dans le quartier, en tapant sur des casseroles. »
« Moi, je grattais aussi la guitare pour m’amuser, poursuit son acolyte. Puis j’ai commencé à fréquenter un minuscule studio avec uniquement un ordinateur et un micro à deux euros : un jouet ! » Surtout, les deux garçons partagent la même passion, obsessionnelle, pour le film indien Toofan : « Le héros vient sauver des peuples persécutés. Avant son arrivée, des vents l’annoncent, comme pour signifier :‘Toofan est dans la place !’. On l’a regardé au moins 2000 fois ! », jubilent-ils.
Aux couleurs du Togo
Si les deux garçons gardent – à peu près – la tête froide après leur tourbillon de succès, c’est peut-être aussi parce que, comme leur modèle cinématographique, ils portent des causes qui les dépassent. En premier lieu, ils élèvent haut les couleurs de leur petit pays. « Aujourd’hui, quand on dit Toofan, on pense Togo ! C’est notre fierté ! On peut dire aux jeunes Togolais que le rêve est possible ! », se réjouit Barabas.
À l’adolescence, les deux amis peinent d’ailleurs à situer leur pays sur la mappemonde musicale, comme l’exprime Master Just : « On a longtemps été en quête de notre identité ‘moderne’ : on écoutait du zouglou, du coupé-décalé ivoirien… On était colonisés par le son des voisins. Il n’y avait aucun artiste togolais célèbre… »
Pour construire le son de leurs tubes, les Toofan s’appuient sur le cœur musical traditionnel de leur pays, et l’habillent de couleurs et d’influences burkinabè, ivoiriennes, etc. : une afro-fusion enthousiasmante. Ainsi séduisent-ils d’emblée les pays frontaliers. Et les voici en train de se hisser en porte-étendard de l’Afrique toute entière, d’une Afrique jeune, prête à en découdre avec l’avenir, d’une Afrique dynamique qui rêve et qui vibre.
« À la base, on n’avait pas Internet, donc on ne savait pas ce qui se passait dans chaque pays du continent, dit Barabas. Aujourd’hui, grâce au web, les gens comprennent que l’Afrique a un potentiel de dingue, en matière de danse, de musique, de peinture, de gastronomie… ». « L’occident nous regarde désormais, renchérit Master Just. Avec la mondialisation, tout a été tellement exploité, uniformisé, qu’il cherche des vibrations différentes. »
Ballon rond et musique
Pour les deux, la force de l’Afrique passe par ces deux armes – le foot et la musique. Master Just explique : « Ce sont les comprimés, la pharmacie. Ils guérissent tous les maux ». « Ils relèvent tous deux de la même ferveur, ajoute Barabas. Le public jubile devant son artiste préféré ou son équipe nationale ! Ce sont deux phares qui donnent de l’espoir et rapprochent les gens. Dans les deux cas, tu dépasses tes dissensions raciales, politiques, tu enterres les haches de guerre ! En 2006, lorsque la Côté d’Ivoire a été qualifiée pour la Coupe du Monde, Didier Drogba et son équipe ont demandé aux leaders ivoiriens de déposer les armes. Ce qu’ils ont fait… »
Comme leurs héros, le duo voit grand. « On aimerait finir comme des légendes : Bob Marley ou Michael Jackson », conclut Barabas. Tout simplement. Rien ne les arrête…
RFI