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Musique : Pam Luster, les grands rêves d’une artiste qui a épousé la musique live


Le Burkina Faso regorge de chanteuses qui se sont faites remarquées par la singularité de leur voix. Pam Luster fait partie de ces artistes dont le timbre vocal ne laisse aucun mélomane indiffèrent. Nous nous sommes entretenus avec l’artiste et voici la substance de notre entrevue.

Don Sharp de Batoro et Philomaine Nanema et Pam Luster sont les trois artistes choisis pour sensibiliser sur la propagation du Covid-19.

Afriyelba : Pouvez-vous vous présenter aux abonnés de Afriyelba ?

Pam Luster (PL) : Mon nom c’est Patricia Wendtoin Minoungou à l’état civil, mon nom d’artiste est Pam Luster. Je suis artiste musicienne burkinabè.

Depuis combien de temps êtes-vous sur la scène musicale ?

PL: Je me suis jetée à l’eau en 2011, déjà pour avoir une idée de mes capacités vocales. Il faut dire que j’ai commencé à chanter depuis que j’ai 8 ans à l’église. Mais il  fallut du temps avant que je me décide à embrasser une carrière d’artiste. Les vicissitudes de la vie nous imposent parfois des contraintes qui nous freinent. J’ai été mariée, je suis tombée enceinte, mais au bout d’un moment j’ai décidé de réaliser mon rêve car nous n’avons qu’une seule vie. Mais avant mes débuts professionnels, moi je me disais qu’il me fallait mesurer mon niveau en me mesurant à d’autres personnes. C’est ainsi qu’en 2011 j’ai participé au concours de musique dénommé Faso Academy en représentant la ville de Fada N’gourma. Je suis allée jusqu’en demi-finale. Ensuite j’ai participé à Castel Live Opéra qui est un concours de chant international encore plus sélectif. J’ai également participé au grand prix de la chanson moderne organisé par le ministère de la Culture. C’est après ces concours de chant que j’ai enregistré un maxi intitulé ‘’Victoire’’ en 2014. Ce maxi était pour moi un moyen de tâter le terrain tout en espérant trouver un producteur. Cette œuvre m’a permis de représenter le Burkina Faso au festival Diverty à Grenoble en 2014. Disons que j’ai 7 ans de carrière.

Quel est votre style de musique ?

PL: Je fais de la variété d’inspiration traditionnelle. Pour moi il est important en m’écoutant de savoir d’où je viens. Il est vrai que y’a des styles qui ne me disent absolument rien du tout, mais je pense qu’il est bien de donner différentes couleurs à sa musique. Dans mon dernier album, j’ai par exemple une chanson très métissée. Vous y entendrez du balax du Sénégal, du zouglou de la Côte d’Ivoire et la guitare vient de chez nous. Mais il est possible qu’un jour je trouve un style propre à moi.

Etes-vous satisfaite de ces sept ans de carrière ?

PL: Moi je suis une éternelle insatisfaite ! Dans tout ce que je fais je me dis toujours que je peux mieux faire. Le bilan est positif mais je me dis qu’il me reste encore beaucoup à faire donc je ne suis pas satisfaite. J’ai déjà produit 3 albums et 1 maxi, donc le bilan n’est pas mal.

De quand date votre dernier album ?

PL: Il devait sortir en mai 2020 mais à cause du Covid19 il est en stand bye pour l’instant. Entre temps j’ai enregistré un certain nombre de singles, donc il est possible que je sorte 2 albums en même temps.

Malgré le Covid19 nous avons tout de même assisté à des sorties d’albums. Pourquoi vous avez préféré repousser la vôtre?

L’artiste à travers l’album  »Reconnaissance » désire témoigner sa gratitude à l’endroit de ceux qui la soutiennent depuis le début de sa carrière.

PL: J’ai juste décidé d’attendre pour mieux me préparer. Je suis à mon troisième album et je ne veux pas faire une conférence de presse habituelle. Je veux offrir un spectacle de taille. J’ai remporté plein de concours de chant et tout ça place la barre assez haute pour moi. En octobre dernier, j’ai par exemple remporté le trophée de la voix d’or qui est en même temps un pass pour une première partie au Zénith de Paris. Je ne peux donc pas faire les choses juste pour le faire. Mais d’ici là je serai prête.

Vous avez reçu récemment un prix pour votre chanson de sensibilisation sur le covid 19. Comment cela est-il arrivé ?

PL: Je dirai que c’est Dieu qui l’a voulu. Dans la carrière d’un artiste, avoir ce genre de prix est énorme. C’est arrivé malheureusement dans une période de maladie mais c’était un devoir pour l’artiste que je suis de faire passer le message. Quand j’enregistrais cette chanson je ne m’imaginais pas qu’elle irait aussi loin. Je me souviens que je fais partie des tout premiers artistes à enregistrer une chanson sur le covid 19; je suis rentrée en studio le 10 mars, au lendemain de la première conférence annonçant les premiers cas au Burkina Faso. J’ai toute de suite pensé qu’il fallait réagir parce que personne n’était préparé à cette maladie et il y’avait la panique. Figurez-vous que personne ne m’a encouragée dans la réalisation de cette chanson. Il y’en a même qui se moquaient de moi en disant que le covid 19 est une maladie de blanc. J’ai cherché en vain de l’aide pour finir la chanson et j’ai dû vider mon compte pour le faire. Après l’enregistrement de la chanson, deux amis ont bien voulu m’apporter un coup de main pour la réalisation du clip. Je leur dit merci d’avoir cru en moi. Un autre ami a écouté la chanson et l’a trouvée vraiment belle. Il m’a alors envoyé un lien d’appel à candidature de l’UNESCO et m’a vivement conseillé de postuler. Le 15 avril était le délai pour postuler et à cause de la connexion, je n’ai pas pu le faire. Mais comme on le dit, quand Dieu décide qu’une chose te revient, il t’ouvre toujours les voies et moyens pour le réaliser. Le soir du dernier jour des dépôts, j’étais désespérée après mes tentatives infructueuses quand après minuit j’ai reçu un message me disant que c’est prolongé au 30 avril. J’ai finalement pu postuler et j’ai remporté le meilleur des prix. Ce qui a véritablement joué en ma faveur, c’est la multitude de langues utilisées dans ma chanson. J’ai reçu 5OOO dollars, environ 2 millions 850 mille mais c’est déjà fini (rires). J’ai réinvesti une bonne partie dans ma musique et j’ai fait plaisir à mes proches.

Vous êtes de nouveau retenue pour une campagne de sensibilisation organisée par l’UNESCO et la CEDEAO.

PL: Effectivement. Nous remarquons qu’il y’ a eu un moment de relâchement un peu partout. La maladie regagne du terrain et il faut vraiment faire quelque chose. C’est ainsi que l’UNESCO et la CEDEAO se sont associées pour apporter une réponse à cette deuxième vague. Ils ont jugé que l’art est un puissant moyen de communication et ont donc fait appel aux artistes pour sensibiliser les populations. Selon leur directives, Philomène Nanéma, Don Sharp de Batoro et moi avons créé des œuvres qui prônent la vigilance, la prudence et la résilience, le vivre ensemble.

Dites-nous comment la femme que vous êtes se sent dans ce milieu artistique.

PL: Être une femme dans le milieu artistique peut être un couteau à double tranchant. Il y’a des situations dans lesquelles on ouvre plus facilement les portes aux femmes et ça c’est un avantage. Mais qu’est ce qui se passe derrière ces portes qui s’ouvrent ? Ça c’est une autre paire de manche. Mais après tout, chacun vient dans la musique avec sa personnalité. La musique ne transforme personne, elle révèle tout simplement ta véritable personnalité. Si tu intègres le domaine musical avec de bonnes valeurs, ce n’est pas la musique qui te transformera.

Garder ses bonnes valeurs ne vous ferme pas certaines opportunités ?

PL: Non ! Tout le monde n’est pas aussi mauvais. Il faut prier Dieu pour tomber sur de bonnes personnes.

Vous n’avez jamais manqué des opportunités parce que vous avez refusez des faveurs à certaines personnes ?

PL: (Rires) Bien sûr ! Mais je fais mon petit bonhomme de chemin et je me plais au niveau où je suis. Quand tu es convaincu de ton don, tu n’as pas besoin de te vendre toi-même car c’est ton art que tu vends. Si tu es limité, tu te débrouilles et refuses de te former pour avoir une bonne base, il va falloir que des gens te poussent ! C’est pour ça que je suis d’accord avec ce que l’ancien ministre de la Culture, Abdoul Karim Sango a dit à l’époque. Si tu es dans un domaine et tu n’avances pas au bout d’un certain nombre d’années, il faut changer. Mais la réalité est que certaines artistes sont musicalement limitées et boostent leurs carences par leur beauté pour pouvoir avancer.

Pam Luster rêve de faire le tour du monde et représenter dignement la musique burkinabè.

Aujourd’hui un producteur décide de vous mettre dans un style qui n’est pas le vôtre. Allez-vous adhérer ? 

PL: Dans la vie on ne dit jamais jamais. Je reste ouverte même si j’ai dit plus haut qu’il y’a des styles qui ne me disent absolument rien. Mais tout dépend de ce que je gagne. Si nous partons sur un contrat de 2 ans par exemple, après je fais mon bilan et je repars dans mon style. Tout est une question de temps bien-être. Si tu ne t’y sens pas bien, tôt ou tard ça te trahira. Mais tu peux commencer également et l’appétit va venir.

Qu’est-ce que Pam Luster espère pour sa carrière les années à venir ?

PL: Je me vois, les années à venir faire le tour du monde pour jouer dans les grands festivals et représenter dignement le Burkina Faso. J’espère rencontrer de grands tourneurs, un grand producteur qui va croire en moi et me mettre dans les meilleures conditions pour que je puisse sortir tout ce qui est au fond de moi. Mais j’espère déjà avant ce grand rêve pouvoir faire le tour du Burkina et faire un grand concert live au CENASA.

A votre avis, que faut-il de plus à la musique burkinabè pour s’imposer aussi bien ici que dans le reste du monde pour ainsi vous aider à réaliser votre rêve ?

Vous savez, on dit que de tous les changements, celui de la mentalité reste le plus difficile. Il y’a un petit changement et il faut saluer les efforts qui sont faits mais on est encore très loin. Il faut que cette fierté dont on se vente ne soit pas seulement dans la bouche. Quand on est fière d’être burkinabè on doit consommer burkinabè. C’est dur mais on va y arriver grâce au travail de tous les burkinabè. Les jeunes aujourd’hui grâce à internet écoute beaucoup de musique d’ailleurs. C’est à nous artistes de savoir faire des fusions tout en restant original.

Dites-nous qui est Pam Luster derrière la scène ?

Je suis une maman qui a à sa charge 3 enfants. Je suis mère de deux grandes filles âgées de 16 et 20 ans. J’ai également à ma charge depuis l’année passée mon petit neveu de 5ans qui est orphelin. Je suis donc une maman de 3 enfants et fière de l’être car mes enfants sont ma plus grande réussite. Je suis fier d’avoir donné la vie et mes enfants me le rendent bien. Mes filles me soutiennent, me comprennent et m’accompagnent comme elles peuvent.

Qu’avez à dire avant qu’on ne se sépare ?

Je vais commencer par remercier tous ceux qui m’accompagnent depuis le début. Je dis un grand merci aux médias qui ont soutenu l’académicienne que j’ai été jusqu’aujourd’hui. C’est en jouant ma musique que des gens se sont intéressés à moi pour ensuite venir à mes spectacles. Le titre de mon troisième album est d’ailleurs ‘’Reconnaissance’’. J’ai choisi ce titre dans un premier temps pour témoigner ma reconnaissance à tous ceux qui ont apporté un plus à ma carrière. Ce titre est également un rêve de reconnaissance nationale de l’artiste que je suis. Je remercie mes professeurs et mes encadreurs qui ont apporté un plus à ma carrière. Je remercie aussi ma famille qui est toujours présente à mes côtés. Merci à tous les burkinabè pour le soutien. Merci à Afriyelba pour cette interview. Merci de vous être intéressé à ce que je fais, c’est la preuve que ce que je fais ne passe pas inaperçu. Bonne chance à chacun de nous et que Dieu bénisse le Burkina Faso.

                                                                                  Interview réalisée par Wend Kouni

 

 

 

 

 


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