Le 13 décembre 2018, sur le site du village de Ciné droit libre situé à l’espace Bogodogo, le célèbre conteur Burkinabé KPG et ses « débatteurs » ont présenté une mise en scène qui s’inspire des principes de la justice traditionnelle, pour faire le procès de la justice moderne.
« Dans nos sociétés les gens font plus confiance à la tradition qu’à l’administration moderne. Les gens ont beau dire que je suis musulman, je suis chrétien, mais on voit beaucoup qui repartent puiser les connaissances et les savoir-faire traditionnels. Du coup nous nous sommes dit pourquoi ne pas avoir une justice qui nous ressemble, qui tient compte de nos réalités, de nos valeurs. C’est pour cela qu’en tant qu’artistes nous avons décidé de repartir dans le très fond de notre culture pour proposer un spectacle à la population ». Voilà résumé le spectacle que KPG et sa troupe ont offert au public de Ciné droit dans la nuit du 13 décembre. Ils étaient au total cinq débatteurs plus Kpg qui jouait le rôle de chef du village. Les 5 acteurs qui accompagnaient le concepteur de « Kayto Vroum !! » se répartissaient le rôle de procureur, d’avocat de la défense et des accusés, de secrétaire de greffe et de gardien des fétiches.

Rappelons au passage que tous ces cinq acteurs qui ont convaincu le public par leur talent poursuivent encore leurs études dans des universités privées et publiques du Burkina. Pendant près d’une heure d’horloge, le public a pu constater les tares d’un procureur qui vante ses connaissances en droit mais qui n’arrive pas à lever le petit doigt pour dire non à l’injustice. L’avocat des accusés s’est débattu comme il pouvait pour prouver qu’aucune preuve tangible ne retient son client. La seule fille, parmi les six acteurs sur scène, jouait le rôle de l’avocat de la défense. Elle a mis à nu les tares de la justice qui se voile la face à la vérité et tente coute que coute de dissimuler les preuves.

Elle s’est même érigée contre le chef du village qui aurait dû faire le jugement un peu plus tôt avant que la situation ne s’empire. Que ce soit dans le banc des accusés ou celui de la défense, chacun clamait son innocence. Au regard de cette situation tendue le gardien des fétiches a donc décidé que chaque camp jure sur les mânes des ancêtres. A ce moment précis tout le monde commençait à se cacher derrière son statut de musulman ou de chrétien afin d’échapper à l’exercice. C’est sur ces notes que la mise en scène a pris fin sans pour autant désigner le coupable. Parce que Kpg ne voulait pas devancer l’iguane dans l’eau en proclamant le verdict du vrai procès de l’affaire Norbert Zongo.
Sougrinoma Ismaël GANSORE