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Prestation des artistes Burkinabè en Europe : Quand l’Eldorado tourne au cauchemar


C’est devenu un phénomène de mode en ce moment au Burkina. Les artistes (ceux qui font dans le flashy) sont régulièrement invités par la diaspora burkinabè en Europe pour «prester» en playback.

Mais le constat ou sinon, les témoignages que je reçois de la part de ceux ou celles qui ont le courage de m’approcher sont souvent désolants et déplorables. Ils partent avec une énergie débordante d’enthousiasme et reviennent tête basse et queue enfouie entre les jambes sans tambours ni trompettes.

Je me pose véritablement une question : Est ce du business à sens unique ou de la promotion de la musique burkinabè qu’on fait? Au départ ; tu as l’impression qu’il y a une unité sans faille qui fonctionne entre les organisateurs pendant les préparatifs de la manifestation, puis après, ce sont les trahisons, les démissions, les bisbilles de toutes part pis encore des empoignades au sein des promoteurs. Bref c’est la débandade totale.

Pourtant nos artistes (notamment pour ceux qui effectuent leur premier voyage) la joie atteint souvent son paroxysme. Ils organisent des points de presse au tarmac de l’aéroport international de Ouagadougou en appelant des journalistes chevronnés qui viennent les interviewer en live au vu et au su des autres voyageurs. Certains artistes vont même jusqu’à promettre monts et merveilles aux journalistes quand ils seront de retour. C’est toute la famille qui se déplace pour dire «Adieu» à leur espoir. On y voit la mère, la grand-mère, le fils ou les enfants de l’artiste, les cousins les tantes, les oncles et même certains anciens se déplacent du village pour venir à l’aéroport dire au revoir. Comme ci on assistait au départ d’un proche au pèlerinage de la Mecque. L’artiste affirme réaliser enfin son rêve et promet qu’il ira à la rencontre des grands prometteur de spectacle en Europe et aux USA. Tout ceci, il voyage sans son ingénieur de son ou tout au moins sans son manager. Donc seul !

Est-ce véritablement un voyage artistique ou une balade de courtoisie en Europe ? Certains vont même souvent jusqu’à me dire dans mon dictaphone, qu’ils vont pour une tournée européenne et américaine tout cela en…playback !

– Qui sont ces pseudos organisateurs de spectacles en playback ?
– Font-ils vraiment la promo de nos artistes ?
– Pourquoi nos artistes se déplacent seuls sans un ingénieur de son, les musiciens ou leur manager ?
– Où dorment-ils et que mangent-ils ?
– Que gagnent financièrement nos artistes ?
– Quels forment de contrats signent-ils ?

C’est autant de questions que je me suis souvent posé. Mais j’ai pu avoir quelques réponses plus ou moins cohérentes.
En prenant le cas des deux derniers artistes qui viennent de rentrer, en occurrence Daisy Frank Siambo et Awa Nadia, j’arrive à avoir les réponses à mes interrogations, bien qu’elles ne m’ont jamais appelé quand elles sont revenues.

Voyez-vous, quand ses innocentes artistes sont parties du Faso, elles étaient en pleine promo et des contrats juteux étaient prévus pour elles ici au Burkina. Elles ont refusé de les honorer malgré les conseils de leur manager pour se rendre en France sur invitation de la diaspora. «Non ne t’inquiète pas Jabbar, se sont mes amis d’enfance qui m’invitent. Je les fais confiance, car on a partagé tout. C’est une carrière internationale qui s’amorce comme ça » m’ont-elles souvent rétorqué.

Eh Dieu ! Si nos artistes avaient juste la moindre conscience que ce n’est que de l’illusionnisme en allant jouer en playback dans les villas des gens et devant 20 personnes. Si elles le savaient, elles allaient préférer se contenter des 300 000 FCFA ou 500 000 FCFA qu’on les offre par spectacle ici.
En ne prenant rien que le cas d’Awa Nadia : avant de s’envoler à l’Hexagone, elle était au top des spectacles. Elle pouvait prester 7 à 9 fois par semaine, en raison de 300 000 FCFA/spectacle en playback !

Quand elles sont arrivées en Europe, me dit-on, elles étaient logées dans les familles (ça ce n’est pas grave) mais elles auraient été confinées dans ses appartements sans véritablement sortir et ne mangeaient que du tô, du babemda bref de la bouffe du Faso. Pourtant elles sont venues pour s’accommoder avec la gastronomie française et européenne. Elles n’auraient rien trouvé d’extraordinaire dans leur vie. Certains vivent difficilement là-bas. C’est encore plus ardu à cause des contraintes européennes. Tout serait calculé ! Pas d’excès, ni de virées dans les bistrots pour prendre une bière si tu n’as pas de sous. Certains parmi eux ont logé nos artistes pensant qu’elles n’avaient pas de sous pour faire des bistrots et du shopping. Elles étaient obligées d’attendre ou de trainer en longueur de journée attendant impatiemment le weekend jour du spectacle, pour prester dans une salle inappropriée avec une sono rafistolée.

L’une d’elle m’a même appelé étant la bas, souhaitant vite rentrer car elle perd assez du temps la bas. Elle aurait abandonné des contrats au Burkina et se sentirait dépaysée. Les responsabilités sont malheureusement partagées, à la fois par les artistes et les promoteurs.

– Ce n’est parce qu’on se fait inviter en Europe par un (e) ami(e) pour un spectacle qu’il faut faire fi du contrat et ne pas impliquer son manager dans les prises de décision.
– Que gagne un artiste en allant jouer en Europe en playback ? Rien ! pire encore il se fait griller dans d’autres vrais festivals huppés comme le Festival Laafi bala ou encore le festival des journées d’Afrique au Québec et ailleurs…

J’admettrai qu’un artiste me dise qu’il va faire une visite de santé en Europe à la rencontre de ses amis et à cette occasion il fera des petites prestations acoustiques pour ses frères et sœurs. Au lieu de nous berner devant l’aéroport qu’on se déplace pour des tournées. Un vieux journaliste comme moi, ça ne sert à rien de me duper. On n’apprend pas à un vieux singe à grimper sur un arbre. Le monde est devenu petit que quelque soit la partie du monde qu’un artiste se présentera, j’aurai dans les moindres détails son actualité au quotidien si je le désire. Je possède des antennes partout !

Que nos artistes apprennent davantage à se consacrer dans l’approfondissement de leur musique en travaillant régulièrement en live. Peu importe, même si ils n’ont pas de contrat. Ce n’est pas parce qu’on possède un titre qui fait tabac qu’il faut aussi bondir sur des invitations en Europe pour des playbacks dans des appartements loués difficilement par nos frères.
Comment pouvez-vous accepter partir jouer en Europe sans cachets au préalable et juste vous contenter des recettes du bizness des organisateurs après la prestation ?
Franchement est-ce que vous pouvez accepter le faire ici au Faso ?
Beaucoup rentre donc de ces «tournées» au Burkina la tête basse à l’aéroport sans informer le moindre journaliste, encore moins dresser un bilan. Ils ne vous passent plus de coup de fil, de peur d’être ridicule à vos yeux, parce ce qu’ils vous auraient fait des promesses.

Laissez ça ! Ce que nous voulons de vous c’est que vous travailler davantage en studio et dans le live. Je suis convaincu qu’à force de travailler comme certains artistes que je connais qui le font déjà, ça portera des fruits. Vous n’allez plus jamais accepter faire ce périple cauchemardesque si vous bossez dur.
Jabbar !


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