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ZAKSOABA (Artiste- musicien) : Découvrez ce qu’il est devenu


Officier de police, Koanda Seydou dit Zaksoaba est une des valeurs sûres de la musique burkinabè. Originaire de Béré, une localité située à quelques encablures de Kombissiri, l’ex-lead vocal de l’orchestre de la Police nationale a connu de véritables heures de gloire à travers tout le Burkina et quelques pays de la sous-région. Pour des raisons de services, des missions onusiennes l’ont éloigné de la scène et de son public pendant plus d’une décennie. Le policier-chanteur renoue avec la tradition en réalisant un nouvel opus de huit titres. Dans cet entretien exclusif qu’il a bien voulu nous accorder, Zaksoaba nous parle de son parcours au sein de l’orchestre de la Police dans les années 86 jusqu’à nos jours, de son regard sur la musique burkinabè, de son nouvel album et bien de surprises. Entretien avec le chef du service « arts et cultur »e de la direction des sports, des arts et de la culture de la Police nationale.

 

Que deviens-tu ?

 

Je suis toujours Koanda Seydou Zaksoaba, je suis toujours policier car je le suis avant d’être un artiste- musicien. Et quand le service commande, moi je m’aligne. Donc ce sont des exigences du service qui m’obligent souvent à être absent du pays.

 

Ne penses-tu pas avoir lâché tes fans au moment où ils avaient plus besoin de toi ?

 

Je suis assujetti à une institution, et quand le commandement donne des instructions, moi j’exécute. (Il rit…) Je ne crois pas avoir abandonné mes fans, la musique burkinabè a continué sa marche évolutive et voilà que je suis là de nouveau pour contribuer à cette marche radieuse.

 

Ton public ne t’a pas manqué ?

 

(Il soupire un instant…) Oui, mon public m’a manqué énormément. Mais il y a certains fans qui avaient mon contact et avec qui nous avons gardé le contact. C’est un public qui sait apprécier.

 

Quels souvenirs gardes-tu des années 86 quand tu commençais à l’orchestre de la Police ?

 

Je garde de très bons souvenirs ; nous avons eu la chance de commencer directement la musique par le live. Nous avons commencé au sein d’un orchestre, et les instrumentistes à cette époque n’ont pas hésité à nous inculquer une connaissance qui nous permet de chanter juste. Ils ont fait tout ce qui était en leur pouvoir pour nous emmener sur le droit chemin vocal. Au sein de cette formation, j’ai beaucoup appris et sillonné tout le Burkina. Je ne vois pas une ville dans ce pays où nous n’avons pas joué.

 

Et que deviennent les autres membres de l’orchestre ?

 

Ils sont là ; comme l’orchestre de la gendarmerie, nous avons connu pas mal de malheurs. Les deux orchestres ont perdu beaucoup d’éléments, néanmoins l’instance supérieure de la Police a voulu qu’en dépit de ces malheurs, l’orchestre de la Police existe toujours, mais il fallait compter avec le matériel qui coûte cher, et avec des institutions comme la Police, ce n’est pas une priorité. Il faut d’abord une volonté politique pour le faire. Il y a un service comme la « direction des sports, des arts et de la culture » à la police et moi je suis le chef du service arts et culture. Avec les recrutements, on se retrouve avec de jeunes talents dans nos rangs. Ce sont des talents qu’on peut utiliser dans l’orchestre de la police qui a été un catalyseur pour apaiser des tensions sociales.

 

La résurrection de l’orchestre de la Police n’est pas pour maintenant ?

 

Je ne saurai le dire. Cette décision appartient à l’autorité. Ces jeunes talents qui foisonnent au sein de la police risquent de passer inaperçus. Il y a certains qui entrent en studio pour réaliser des albums, mais cela ne va pas loin. Il n’y a pas mieux que le live. Là où ne va pas votre CD, il y a des contrats qui peuvent venir de là. Et j’interpelle les autorités à revoir l’orchestre de la Police car, pendant les périodes de troubles, il n’y a que la musique pour apaiser les cœurs. En son temps, il y avait les orchestres de la Douane, de la Gendarmerie, du RPC et de la Police. Ce sont des hommes de tenue, et quand ils jouaient, c’était une véritable symbiose avec les populations civiles.

 

Comment s’est faite la rencontre avec feu Charles Oubraogo qui était ton complice au sein de l’orchestre, mais n’était pas policier ?

 

La rencontre s’est faite comme ça par hasard. Il avait été produit à Abidjan et arrangé par Prince Edouard Ouédraogo. Il a une chanson qui était un succès au Burkina. Et comme l’orchestre de la police interprétait beaucoup de musique burkinabè, j’interprétais parfaitement sa chanson, si bien que certains pensaient que c’était notre propre composition. C’est ainsi que quand Charles est venu à Ouagadougou, il a cherché à me rencontrer. Paix à son âme.

 

Passi Polo et Grand Kassa furent tes danseurs qui sont malheureusement décédés, que retiens-tu d’eux ?

 

Je leur rends un vibrant hommage. Ceux-là même qui font actuellement la fierté de la musique burkinabè, beaucoup sont passés à mes cotés, c’est la vie et la volonté de Dieu. Kassa était un frère, Passi Polo a évolué près de 22 ans avec moi avant de partir, il y a également Affo Love, c’est malheureux mais c’est la vie. Quand je regarde certaines photos, ça me fait mal. Il y a des images que le temps ne peut pas effacer.

 

Il y a eu l’album à succès « Zaksoaba », c’est de là qu’est venu ton surnom ?

 

Ce sont les fans qui m’ont donné ce surnom. Les artistes, c’est comme ça et ça vous colle à la peau.

 

Parle-nous de ton aventure avec le Général Défao ?

 

C’est Claude Bassolé qui, en son temps, avait produit Black So Man qui malheureusement est décédé. C’est ainsi qu’il cherchait un autre artiste Burkinabè pour produire et son choix s’est porté sur moi. Je me suis donc retrouvé à Abidjan où j’ai rencontré Défao et son orchestre les Big- Stars avec qui j’ai fait un album. L’œuvre a connu un véritable succès avec dix mille exemplaires vendus en neuf jours et c’était la première fois que le BBDA récompensait un artiste.

 

A quand le retour du Zaksoaba national avec un nouvel album ?

 

Je rentre d’Haïti après une mission onusienne, je viens de finaliser un album pour ne pas me faire oublier. Je ne l’ai pas fait pour conquérir un public. Je me suis dis que tous ceux qui nous ont soutenus et supportés à notre temps, tous ne sont pas morts. Ils réclament toujours cette voix. Et tant que j’ai la possibilité de le faire, je le ferai. Je viens de produire un album mais je ne fais pas de tapage autour. C’est paradoxal, les gens ne comprendront pas comment je produis un album et je ne fais pas toute la publicité autour et sans un staff.

 

Parle-nous de cet album ?

 

C’est un album de huit titres enregistré avec Prince Edouard Ouédraogo et Saint- Dame comme arrangeurs. L’œuvre s’appelle « Yé yaa », c’est en quelque sorte une interpellation en Mooré. C’est par respect quand deux individus discutent et que vous voulez les interrompre pour dire quelque chose ;, voilà comment s’y prendre, vous dites « yé yaa ». Au fait, le mooré a cette quintessence qu’on ne peut pas expliquer en Français.

 

Es-ce le même Zaksoaba qu’on retrouve sur cet album ? Et quel est sa thématique centrale ?

 

Je ne vais pas changer, je ne suis pas la tendance et je ne vais pas faire du coupé-décalé. Je vais me ridiculiser si je fais cela. Je maîtrise les rythmes de mon terroir et si tu m’y rejoins, tu vas me trouver. Les thèmes sont restés les mêmes, ce sont les faits de société, Je suis resté le même. Quand on sort un album, on se demande de nos jours comment faire pour qu’il décolle, c’est la première fois que j’injecte mes propres fonds dans la production d’un album. Ce n’est pas aisé et ce n’est pas chose perdue. Il est disponible dans les discothèques et je ne ferai pas de publicité autour.

 

Pourquoi ce choix ?

 

C’est comme ça. Avant les animateurs étaient des passionnés, mais maintenant ce n’est plus le cas. Avant ils partaient vers les artistes ; toi Kerson, je t’ai connu cela fait presque vingt ans, voilà qu’on est toujours ensemble et c’est toi qui a cherché à m’interviewer. Il n’y a plus cette chaleur entre les animateurs et les artistes. Actuellement il y a des radios où je passe et les gars ne me reconnaissent même pas. De toute façon je ferai le tour des radios, j’irai vers elles.

 

Avec du recul, quel est ton regard sur la nouvelle génération ?

 

Je me dis que ça va mais il y a du travail à faire. Quelque part il y a la facilité et ce n’est pas en notre faveur. Il y a les logiciels et on oublie le vrai travail. Et pire, qu’est-ce qu’on fait de nos langues et de nos rythmes ? Nous parlons mal notre langue et nous exploitons mal nos rythmes. Un artiste burkinabè ne pourra pas aller jouer au Bataclan ou au Zénith avec une musique d’un autre pays. Il n’y a pas de honte à être Burkinabè. Les autres artistes qui jouent dans ces salles n’exploitent que les rythmes de chez eux. Et on s’étonne de voir des albums qui passent comme des feux de paille, et après on se demande pourquoi la musique burkinabè n’avance pas.

 

Quel est ton mot de la fin ?

 

En Côte d’Ivoire, ils ont fait venir des grands arrangeurs et techniciens comme Boncana Maïga, Rochereau et bien d’autres ; quand ils ont formé les jeunes, on leur a demandé de partir, mais c’est la matière qui y est restée. Ici, notre qualité c’est la copie. Je dis à mes fans qu’il n’y a pas d’âge pour arrêter la musique. J’ai commencé par le live et je me vois mal en play-back. Merci à votre journal pour l’intérêt que vous m’accordez.

 

Propos recueillis et transcrits par Aboubakar Kéré KERSON

 


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